« Où vas-tu paysan avec ton bobo neuf, ton chapeau bariolé et ton sourire plissé, je vais à Yaoundé, Yaoundé la capitale » comme ce morceau mythique sorti dans les années 80 , André Marie Talla s’en va aussi à Yaoundé la capitale.. il s’en va célébrer ses 55 ans de carrière musicale aux côtés de ses nombreux fans au palais des congrès.
55 ans déjà, une cinquantaine d’années que l’artiste frise les cœurs et les esprits de par ses mélodies dont lui seul a le secret. 55 ans de spectacles, de fêtes, de musique et d’histoire, celle que nous vous racontons au travers de cet article, c’est l’histoire de André Marie Tala, un artiste à nul autre pareil.
Enfance et jeunesse
Il est né le 29 octobre 1950 à Bandjoun dans l’Ouest Cameroun, ses parents sont d’ailleurs originaires du même village. À l’âge de 4 ans André Marie Tala perd sa mère, et douze ans plus tard son père aussi. Il est ensuite recueilli et éduqué par sa grand-mère, Marie-Thérèse Mambwa. Il fabrique avec Joseph Tala, un ami d’enfance sa première guitare à base de nervure de bambou, avec pour corde le fil de pêche et s’applique à imiter le plus fidèlement possible les rythmes qui berçaient son enfance.
À l’âge de 15 ans , le pire se produit, il perd brutalement la vue sans qu’aucun symptôme n’ait pu le présager, Les premières années ayant suivi sa perte de vue furent très difficiles pour lui au point où il se mit même à faire le procès de Dieu..
Témoin du Maquis
Envoyé par sa grand mère pour remettre un colis, il croise des têtes coupées de nationalistes camerounais au carrefour maquisards dans la ville de Bafoussam. Il dit « se souvenir de celles d’un homme et de ses deux femmes, récemment installés dans son village, dont les têtes été tranchées et exposées sur la place du village» , il se souvient aussi des « avions jaunes bombardant son village durant cette période post indépendance à l’ouest du Cameroun». Il passe des nuits en brousse dans le maquis et connait le laissez passer Bamileke, ( papier de contrôle des entrées et sorties du territoire des grassfields, alors sous couvre feu durant ladaite période)» .
Carrière .
Tout commence à 17 ans, l’artiste tombe alors amoureux de la musique, surtout de la musique française. C’est l’époque dite « yéyé » . Il crée sa première composition en 1967 avec pour titre «J’ai faim ». Cette même année, à l’occasion d’une tournée officielle du Président Ahidjo à Bafoussam, Radio Cameroun organise une émission publique à laquelle les jeunes musiciens de la ville sont invités à chanter. Tala, avec sa guitare en bambou se présente et obtient un succès remarquable.
Depuis ses débuts, André -Marie Tala est très souvent comparé aux chanteurs afro-américain Stevie Wonder et Ray Charles du fait de leur handicap commun, la cécité. De tous les chanteurs, c’est à Johnny Hallyday que va sa préférence. Influencé par ces sonorités et accords nouveaux, il fonde son premier groupe musical, les ”Rock Boys” avec lequel il interprète ses premières compositions : les peines du travail, honore ton père et ta mère. Le succès est immédiat. Suivent alors les premiers contrats et concerts à travers l’Afrique. Les « Rock Boys » deviennent les « Black Tigers » avec pour guitariste un jeune, Sam Fan Thomas qu’il a contribué à former comme guitariste. Le groupe est constitué de Jean-Bosco Kamguaing dit Black Joe à la basse, Fokou Thomas dit Tom Dollars à la Batterie, Keuboum Prosper dit Rodi aux percussions, Ndonfeng Samuel dit Sam Fan Thomas à la guitare.
Une rencontre qui va changer le cours de son histoire.
En février 1972, lors de la 8ième Coupe d’Afrique des Nations qui avait lieu au Cameroun,Tala André Marie rencontre Manu Dibango, une rencontre qui sera déterminante pour l’envolée de sa carrière, celui-ci lui a notamment conseillé de se tourner vers les maisons de disques françaises. Manu Dibango était déjà au sommet de son art mais AMT n’avait que 20 ans et venait de débuter.
Tala va à la rencontre de Manu pour lui dire qu’il est à la recherche d’un studio compétitif pour enregistrer. Après avoir joué quelques titres pour faire étalage de son talent et de ses compétences, Tala réussit à séduire Manu. En octobre 1972, Tala s’envole à l’invitation de Manu Dibango pour Paris grâce à la solidarité des membres de sa famille et de ses amis qui ont réussi à regrouper un peu d’argent pour qu’il aille enregistrer en France. Il compose cette année là les titres Sikati, Potaksina et surtout Namala ebolo: plus de cent milles disques vendus.
Plagié par James BROWN .
En 1975, le natif de Bandjoun assoit encore plus sa notoriété avec l’album « Hot koki », succès international qui va lui valoir d’être plagié par James BROWN sous le titre « The Hustle » . En 1978 soit 4 années d’intenses combats juridiques, la justice lui donne raison et condamne James BROWN à lui reverser la totalité de ses droits. « Je suis allé vers lui pour lui remettre un exemplaire de hot Koki pour qu’il sache ce que nous faisions comme musique au Cameroun mais par la suite, j’ai été surpris de constater plus tard qu’il avait interprété ma chanson dans la même gamme, la même introduction, le même corps du morceau sur le plan rythmique et les mêmes refrains. Il a juste adapté les paroles en anglais. Voilà pourquoi je suis allé, tout de suite, à Paris où, avec mon éditeur, nous avons pris des avocats pour attaquer James Brown aux États-Unis» avait t’il raconté dans une interview.
Une itinéraire sans faille.
Dans sa discothèque, de nombreux sons à succès y sont gardés, c’est son patrimoine mais surtout c’est un patrimoine national, on note Ndjamena sorti en 1975 , Black Woman en 1976, Arabica en 1978 et Super Tchamassi la même année… La liste est loin d’être exhaustive.
Le parcours professionnel de l’artiste à renom est exceptionnel et est reconnu avec des preuves , il a à son actif plusieurs distinctions parmi lesquelles le prix de la jeune chanson francophone décerné 9 février 1978 par le maire de Paris, le prix Charles Humelle décerné en 1980 par la SACEM, le prix Epi d’Or – FENAC (Festival national des arts et de la culture du Cameroun) en décembre 1998 ou encore le prix du meilleur chanteur de variétés pour l’Afrique Centrale – Koras 2000 – Sun City (Afrique du Sud). En 2014, il est élevé au rang de Chevalier de l’ordre du mérite, il est fait Officier de l’ordre de la Valeur du Cameroun en 2016 et enfin commandeur de l’ordre national de la valeur en avril 2022.
L’année 2013 a marqué les 45 ans de carrière d’André-Marie Tala. La célébration a commencé avec la sortie de son album Trajectoire et s’est poursuivi avec une série de spectacles : le 29 novembre 2013 à Douala Bercy au Cameroun, le 17 mai 2015 à l’Olympia Bruno Coquatrix à Paris en France, le 3 septembre 2016 à Montréal au Canada, le 24 septembre 2016 à Washington aux Etats-Unis et le 8 avril 2017 au centre culturel d’Uccle à Bruxelles en Belgique.
2024 représente 55 ans de carrière et il promet d’être tout aussi exceptionnelle qu’en 2013 car l’artiste a mobilisé toute son équipe pour des concerts à n’en plus finir.. le premier se tiendra à Yaoundé le 25 octobre et le prochain à Douala dans les semaines à venir. Ou vas-tu ? Je vais à Yaoundé, la capitale, pour écouter André Marie Tala.
Constantin GONNANG, Afrik Inform ☑️
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