C’est avec une immense tristesse que le monde de la musique camerounaise, et au-delà, celui de toute l’Afrique, a appris le décès de l’artiste Koko Ateba. Ce vendredi 13 décembre 2024, la talentueuse chanteuse et guitariste camerounaise a rendu son dernier souffle à l’hôpital Foch à Paris, emportée par une longue lutte contre le cancer.
Âgée de 62 ans, elle laisse derrière elle un héritage musical inoubliable et une empreinte indélébile dans les cœurs de ses fans.
Une carrière marquée par la résistance et l’engagement
Originaire de Zoetélé, au village Abangok, Koko Ateba s’est imposée comme l’une des figures les plus marquantes de la scène musicale camerounaise et africaine. Dotée d’une voix envoûtante, douce et puissante à la fois, elle a su tisser des liens entre le jazz, le blues, le folk et les rythmes traditionnels camerounais.
C’est grâce à sa reprise du célèbre titre Frou Frou que Koko a fait une entrée fracassante sur la scène française dans les années 1990, après avoir été repérée par l’animatrice Christine Bravo, qui l’a choisie pour son émission du même nom. Mais cette réussite en France n’a jamais fait oublier ses racines africaines et son engagement dans des causes sociales et politiques, qui ont parfois bouleversé sa carrière.

À l’aube de sa gloire, Koko Ateba a fait face à une épreuve dévastatrice. En 1988, après avoir interprété le titre Atemengue, une chanson qui abordait la stérilité féminine et le vol d’enfants, elle fut incarcérée suite à des accusations infondées d’insulte à l’égard de la Première Dame du Cameroun. L’incident a non seulement marqué la fin de son ascension fulgurante à l’échelle nationale, mais a aussi précipité son exil.
Koko fuit son pays, d’abord vers le Gabon, puis vers la France, où elle connaîtra une reconnaissance internationale.
L’héritage d’une artiste plurilingue et engagée
Koko Ateba ne s’est jamais laissée enfermer dans un seul genre musical. Artiste éclectique, elle a maîtrisé plusieurs langues, interprétant ses chansons en Ewondo, en Pidgin, en français et en anglais. Ce métissage linguistique, à l’image de sa carrière, a permis à son art de traverser les frontières et de toucher un public diversifié.
Ses albums, dont Talk Talk en 1986 et l’éponyme Koko Ateba en 1993, sont de véritables témoignages de sa polyvalence et de son talent unique. Elle a su mêler le bikutsi, le jazz et le folk avec une telle fluidité que ses compositions restent aujourd’hui encore des classiques de la musique camerounaise.
Mais au-delà de son talent, c’est l’engagement de Koko Ateba qui la rendait si particulière. Ses chansons étaient autant de plaidoyers pour la paix, l’unité et l’amour. Elle n’a jamais hésité à utiliser sa musique comme un outil de contestation sociale, parlant des difficultés de son pays, mais aussi de la condition des femmes et des minorités.
Sa voix, douce mais ferme, portait des messages de solidarité et de justice, des valeurs qui ont fait d’elle une figure respectée, tant au Cameroun qu’à l’international.
Des voix bouleversées : Akere Muna et Rémy Ngono rendent hommage.
L’annonce de sa disparition a profondément affecté ceux qui l’ont connue et admirée. Akere Muna, avocat et ancien bâtonnier, a partagé son émotion « Koko Ateba était une artiste talentueuse et engagée, dont la prise de position avait d’abord conduit en prison, puis en exil. Mais c’était aussi une voix douce et apaisante, qui portait un message de paix et d’amour. Je garde d’elle le souvenir d’une femme courageuse, une grande dame de la culture camerounaise. »

De son côté, Rémy Ngono, journaliste et ami de longue date, a écrit « J’ai eu le privilège de connaître Koko Ateba pendant plus de 40 ans. Ses convictions politiques et sociales profondes étaient rares et inspirantes. À travers sa musique, elle chantait l’amour, l’unité, l’amitié et la solidarité. Elle plaidait avec passion pour un dialogue authentique comme solution aux crises dans les régions du Nord-Ouest et du Sud-Ouest du Cameroun. Koko Ateba nous manquera profondément, mais sa voix douce et les mélodies apaisantes de sa guitare garantiront que son héritage perdurera. »
Un adieu douloureux mais un héritage immortel
Ce vendredi, l’Afrique perd une de ses plus grandes voix, mais aussi une militante de la culture et de la paix. Koko Ateba, qui a illuminé les scènes de Douala à Paris, a succombé après plus d’un an de lutte contre le cancer. Son fils unique, James, ainsi que ses proches, sont aujourd’hui plongés dans une douleur indescriptible.
Mais au-delà de cette peine, il y a la certitude que son héritage musical perdurera à travers ses chansons. Sa guitare, complice de son âme, continuera de résonner dans les cœurs des générations à venir. Koko Ateba, cette grande dame de la musique, restera à jamais une icône, une légende.

Sa voix, sa guitare, et ses messages engagés marqueront les mémoires longtemps après sa disparition. Elle rejoint désormais les étoiles, mais son art vivra pour l’éternité.
Repose en paix, Koko Ateba. Le Cameroun et l’Afrique, dans leur grande diversité, pleurent une artiste hors du commun. Mais grâce à toi, le monde est un peu plus beau, un peu plus riche en émotions et en valeurs humaines.
Constantin GONNANG, Afrik Inform ☑️