Habituellement discret, effacé, presque invisible dans l’ombre du secrétaire général de la présidence ( Ferdinand Ngoh Ngoh) que l’opinion publique considère comme le véritable détenteur des pouvoirs exécutifs, Joseph Dion Ngute semble ces dernières semaines occuper fortement l’espace médiatique. Ponts, routes, mines, bâtiments ministériels…
« Au nom du président de la République » , le chef du gouvernement multiplie les inaugurations et visites officielles, donnant l’impression, pour certains, de mener une campagne électorale silencieuse à travers ses fonctions institutionnelles. Le vacarme des travaux, le parfum du bitume neuf, le crissement des rubans que l’on coupe : tout devient matière à forte visibilité.
Infrastructures et visibilité : quand le Premier ministre devient acteur politique
Le 30 septembre 2025, au quartier administratif d’Etoudi à Yaoundé, le soleil glisse sur les façades neuves du Ministère des Travaux Publics. Dion Ngute s’avance, cravate parfaitement nouée, et coupe le ruban symbolique. Le complexe, bâti sur une superficie totale de 15 830 m², s’élève comme un symbole de puissance discrète : le bâtiment A culmine à 13 étages, les B et C à 7, et le D à 6. Le vent fait bruire les feuilles des palmiers plantés autour, tandis que les caméras et les smartphones enregistrent chaque geste. « C’est un symbole de modernité et d’efficacité administrative », souffle un fonctionnaire, impressionné par la solennité du geste.

Quelques jours plus tôt, le 25 septembre, Dion Ngute posait la première pierre de l’usine de bauxite de Minim-Martap, dans l’Adamaoua. La poussière rouge du site se mêle au brouhaha des engins, aux cris des ouvriers et au bourdonnement des hélicoptères des médias présents. Avec un milliard de tonnes de réserves, la mine promet 5 000 emplois directs et 20 000 indirects, et l’ombre des grues dessine des géométries spectaculaires contre le ciel. Selon un responsable, « c’est la première fois qu’on voit autant d’attention portée aux communautés locales par le Premier ministre ».

Le 22 septembre, à Kribi, Dion Ngute inaugure la mine de fer Bipindi Grand-Zambi et pose la première pierre du terminal minéralier de Sinosteel. Le bruit des concasseurs résonne comme un écho du futur industriel du pays. Igor Eric Ngantchou, directeur général de G-Stone, rappelle : « La formation locale est au cœur de notre projet ». Dion Ngute, en coupant le ruban, apparaît comme l’homme qui transforme les discours présidentiels en projets tangibles, un acteur que le pays voit concrètement à l’œuvre.

Ponts, routes et intégration sous-régionale : une stratégie d’image subtile
En avril 2025, à Yagoua, l’air tremble sous le soleil sahélien de 43°. Les deux Premiers ministres, camerounais et tchadien, inaugurent le pont de 620 mètres sur le Logone, entourés de groupes de danses patrimoniales, de la population riveraine et des partenaires financiers. Le métal neuf du pont scintille sous la lumière, et chaque pas des dignitaires résonne dans l’espace ouvert. « Là où la route passe, le développement suit », dit un riverain, soulignant la dimension politique et symbolique de l’acte.

Dimanche 5 octobre 2025 restera gravé dans les mémoires à Messamena. Le Premier ministre, chef du gouvernement, a procédé à la mise en service du tronçon routier Mbama–Messamena (45 km), sous les acclamations des populations venues nombreuses. Le parfum du goudron encore chaud se mêle au crissement des véhicules inauguraux roulant pour la première fois, tandis que le sourire des habitants, soulagés, illumine la route enfin praticable.

Aux côtés du ministre Joseph Lé, du sénateur Benjamin Amama et du maire de Messamena, Serges Nkouok, Dion Ngute a salué une réalisation majeure du Président Paul Biya, symbole de la parole tenue et du désenclavement du Haut-Nyong. « Cette route est le témoignage d’une volonté constante d’unir le Cameroun par le développement », a déclaré le Premier ministre.
Pour Joseph Lé, « Mbama–Messamena, c’est la route du soulagement et de l’espérance ». Le sénateur Amama a rappelé : « Ici, nous ne suivons pas Paul Biya par calcul, mais par conviction ». Entre joie populaire et fierté collective, l’Est a célébré un acte fort du développement national. L’Est avance, avec le Cameroun.
Derrière la simple cérémonie se lit une logique de présence subtile et médiatique, où chaque détail — gestes, paroles et sourires — construit l’image du Premier ministre comme l’homme qui incarne concrètement la vision présidentielle.
L’ impact de la visibilité institutionnelle
Pour les spécialistes, cette série d’inaugurations dépasse la simple exécution administrative. Selon Mr Tchouamo, expert en communication politique à Yaoundé, « Dion Ngute se positionne subtilement dans l’espace public. Chaque ruban coupé, chaque pierre posée, chaque discours devant les populations lui donne de la visibilité sans qu’il n’ait à faire campagne directement ».
Christine Mbarga, consultante en communication institutionnelle, ajoute : « En période électorale, les électeurs perçoivent celui qui agit, qui inaugure, comme un acteur central du pouvoir. Même si le Premier ministre agit pour le compte du président, cette présence répétée le rend incontournable aux yeux de l’opinion publique ». Les images de Dion Ngute circulent désormais partout : sur les réseaux, dans les journaux, dans le quotidien des citoyens.
Une présence qui interpelle
Ce qui frappe dans ces déplacements, c’est l’omniprésence du Premier ministre dans des projets symboliques pour l’économie et le quotidien des Camerounais. Ponts, routes, mines, bâtiments administratifs… chacun de ces événements est une scène où Dion Ngute se met en lumière, où son image se projette dans l’espace médiatique et physique du pays.

À travers ces inaugurations, il devient visible à un moment où les regards se tournent naturellement vers la présidentielle 2025. Le message, silencieux mais puissant, est clair : même effacé par l’histoire et les rôles institutionnels, le Premier ministre sait se faire voir quand il le faut.
Le souffle du vent dans les arbres, le crissement des rubans, le bourdonnement des caméras, tout contribue à une narration où le geste politique devient image et présence tangible pour tous les Camerounais.
En savoir plus sur Afrik-Inform
Subscribe to get the latest posts sent to your email.
Laisser un avis