« Même si les résultats ne me sont pas favorables, le peuple s’est exprimé, et le verdict des urnes est clair ». Dans un communiqué de presse, Joshua Osih, candidat du Social Democratic Front (SDF), a pris la parole pour la première fois depuis la tenue de l’élection présidentielle du 12 octobre 2025. À rebours de la cacophonie politique actuelle, sa sortie tranche par son ton apaisé, son sens de la mesure et une rare maturité démocratique.
Alors que la scène politique camerounaise est en proie à des revendications croisées, des auto-proclamations intempestives et des rappels à l’ordre du gouvernement, la voix du SDF s’est élevée comme un contrepoint à la surenchère verbale. Joshua Osih a choisi de reconnaître le verdict des urnes sans détour. « Le peuple s’est exprimé, et le verdict est clair », écrit-il d’entrée de jeu, saluant la souveraineté populaire. Une position rare dans un climat où chaque camp revendique la victoire et où la méfiance vis-à-vis des institutions électorales atteint son paroxysme.
Le président du SDF, héritier politique du légendaire Ni John Fru Ndi, n’a pas cherché à dissimuler sa défaite. Au contraire, il en a fait le point de départ d’un appel à la responsabilité, à la paix et à la réforme. Dans sa lettre, il exprime sa gratitude à ses équipes, saluant « celles et ceux qui ont travaillé sans relâche à la conception d’un projet alternatif pour le Cameroun ».
L’éloge du verdict populaire et la leçon de démocratie
L’homme du SDF adopte un ton ferme mais respectueux, soulignant que sa démarche s’inscrit dans une foi profonde en la démocratie. « Nous prenons acte du verdict des urnes dans le respect total de la volonté souveraine du peuple camerounais et de la République », affirme-t-il. Cette phrase, qui aurait pu paraître anodine dans une démocratie apaisée, résonne avec une force particulière dans un pays où l’histoire électorale est marquée par la contestation et la suspicion.
Osih prend ainsi le contrepied des déclarations incendiaires qui circulent depuis la clôture du scrutin. Là où d’autres candidats ont vu dans les lenteurs administratives la preuve d’un complot électoral, le candidat du SDF y voit surtout la nécessité d’une modernisation du système.
« Notre projet proposait la digitalisation complète de l’administration publique camerounaise, afin que plus jamais une élection ne nécessite plusieurs semaines avant la publication de ses résultats », rappelle-t-il, dénonçant indirectement les lourdeurs et l’opacité qui continuent de miner le processus électoral.
Un discours lucide sur la fragilité institutionnelle
L’homme politique ne se contente pas de commenter les résultats : il y lit un symptôme d’un mal plus profond. Pour lui, les institutions camerounaises ont besoin d’un second souffle — un renouveau dans la gestion des élections, mais aussi dans la conception même du pouvoir.
Sans verser dans la contestation, il évoque les irrégularités constatées par ses équipes, tout en rappelant sa confiance dans le Conseil constitutionnel, seule instance habilitée à trancher. « Nous faisons confiance à cette haute institution pour examiner ces faits avec rigueur, impartialité et indépendance », écrit-il.
Mais son message est clair : le SDF ne sera pas un instrument de déstabilisation. « Si un éventuel recours devait aller à l’encontre de la volonté clairement exprimée du peuple camerounais, nous nous abstiendrons de le poursuivre, car la stabilité de notre nation et la préservation de la paix doivent toujours primer », insiste-t-il.
Dans un pays où la tentation de la confrontation politique reste vive, ce positionnement tranche. Il s’agit là d’un geste calculé, mais profondément symbolique : celui d’un homme qui choisit de se tenir du côté de l’État plutôt que du tumulte.
Le SDF face à son propre destin
Pour le Social Democratic Front, cette élection marque un tournant. Autrefois premier parti d’opposition, le SDF a vu son influence s’éroder au fil des scrutins, miné par les divisions internes et la montée de nouvelles forces contestataires.
En acceptant sa défaite, Osih tente de réhabiliter l’image d’un parti institutionnel, attaché à la légalité républicaine. Son communiqué, bien qu’il n’en fasse pas mention explicite, sonne comme une tentative de repositionnement : sortir du radicalisme pour redevenir une force crédible dans le jeu démocratique.
Cette posture républicaine pourrait redorer le blason du SDF auprès d’une partie de l’électorat urbain, lassé des querelles et des illusions post-électorales. « Au-delà des partis et des candidats, c’est le Cameroun qui doit sortir vainqueur de cette élection », conclut-il — une phrase simple, mais lourde de sens, à l’heure où la classe politique semble plus divisée que jamais.
Dans une République encore marquée par la méfiance et la polarisation, la sortie du candidat du SDF ouvre une brèche : celle d’un dialogue possible, d’une opposition responsable et d’une culture démocratique en gestation.
Joshua Osih, en se présentant comme le visage du respect institutionnel, prend le risque de déplaire à ceux qui attendaient une posture plus combative. Mais il parie sur l’histoire, sur le temps long et sur une idée : celle d’un Cameroun qui se construit non dans la colère, mais dans la continuité.
Car pour lui, la véritable victoire ne réside pas dans les chiffres d’un scrutin, mais dans la dignité d’un peuple capable de respecter sa propre parole.
En savoir plus sur Afrik-Inform
Subscribe to get the latest posts sent to your email.
Laisser un avis