Dans un communiqué au ton grave, l’Union Démocratique du Cameroun (UDC) rompt le silence après le scrutin présidentiel du 12 octobre. Si d’autres candidats revendiquent la victoire ou admettent leur défaite, Hermine Patricia Tomaino Ndam Njoya, candidate du parti, dresse un réquisitoire implacable contre un système électoral qu’elle juge “biaisé, verrouillé et contraire à la vérité démocratique”.
Foumban, 14 octobre 2025.Trois jours après la fermeture des bureaux de vote, la voix de l’Union Démocratique du Cameroun s’est enfin élevée. Dans un communiqué dense et solennel, signé par la présidente nationale du parti, Hermine Patricia Tomaino Ndam Njoya, l’UDC dresse un constat sévère du scrutin présidentiel.
La formation fondée par le défunt Dr Adamou Ndam Njoya, figure emblématique du pluralisme politique au Cameroun, parle sans détour de « nombreuses irrégularités majeures » qui auraient, selon elle, « gravement entaché » la crédibilité du vote.
La candidate, qui s’exprimait pour la première fois depuis le 12 octobre, se refuse à évoquer la victoire ou la défaite. Son message va au-delà de la compétition électorale : il questionne la sincérité même du processus.
“Des bureaux fictifs, des scrutateurs expulsés, un fichier électoral corrompu”
L’UDC décrit une série d’irrégularités qu’elle juge “systémiques et planifiées”. Dans la liste des anomalies relevées par ses équipes de terrain, figurent « des bureaux de vote installés dans des lieux privés, inaccessibles ou dans des casernes », « une répartition arbitraire des places dans les bureaux », ou encore « des procès-verbaux falsifiés avant leur transmission officielle ».
Le communiqué fait également état de « citoyens titulaires de cartes électorales dont les noms étaient absents du fichier officiel » et de « votes multiples facilités par la distribution non contrôlée de cartes d’identité ».
Ces éléments, selon le parti, traduisent un “dysfonctionnement structurel du système électoral camerounais”, rendu possible par un code électoral “profondément biaisé”.
« Dans ces conditions, parler d’élections libres, transparentes et crédibles relève de la fiction », dénonce le texte, qualifiant le scrutin de “processus verrouillé où la vérité devient une variable politique”.
Une dénonciation enracinée dans la tradition critique du parti
Cette posture s’inscrit dans la continuité historique de l’UDC, formation qui, depuis les années 1990, se réclame d’un idéal démocratique fondé sur la justice, la liberté et le progrès. Hermine Patricia Ndam Njoya, qui a succédé à son époux à la tête du parti, reprend à son compte cette ligne doctrinale : celle d’une opposition institutionnelle, mais intransigeante face à la dérive électorale.
« L’UDC ne saurait cautionner un tel déni de démocratie. Nous ne nous reconnaissons pas dans ce simulacre électoral », écrit la candidate, accusant le régime en place de “confisquer la volonté souveraine du peuple par la manipulation, la peur et la fraude”.
Cette déclaration, d’une rare fermeté, s’accompagne d’un appel à la responsabilité des institutions et d’une mise en garde implicite contre les conséquences d’un tel “déni démocratique”.
Mais l’Union Démocratique du Cameroun ne s’arrête pas à la dénonciation. Elle propose une voie de sortie, une feuille de route pour rétablir la confiance dans le processus électoral. D’abord, le parti insiste sur l’urgence d’une refonte profonde et consensuelle du code électoral, afin qu’il devienne un instrument clair, vérifiable et conforme aux standards internationaux.
Ensuite, il réclame la publication immédiate et authentifiée de tous les procès-verbaux, sous le contrôle des partis politiques, de la société civile et des observateurs indépendants, comme gage de transparence. Enfin, l’UDC appelle à l’ouverture d’un dialogue national sur la gouvernance électorale, destiné à rebâtir la légitimité des institutions et restaurer la confiance du peuple camerounais dans sa démocratie.
Pour la candidate de Foumban, ces mesures ne sont pas des options, mais des préalables à toute renaissance politique : « Notre politique n’est pas celle d’un parti contre un autre, mais celle de la vérité contre la manipulation, de la justice contre l’arbitraire, de la dignité contre la résignation ».
Entre héritage et résistance
Cette sortie confirme la présence active et continue de l’Union Démocratique du Cameroun sur la scène politique nationale. Dans un contexte électoral tendu, marqué par le scepticisme grandissant vis-à-vis du système de vote, la maire de Foumban, reprend la parole au nom du parti.
À ses côtés, l’UDC affirme sa volonté de défendre la transparence, la justice et la légitimité démocratique, en restant fidèle aux principes qui ont toujours guidé sa ligne politique. Dans le texte, un avertissement s’adresse directement au pouvoir : « Le régime en place portera l’entière responsabilité politique et morale des conséquences qui découleront de ce déni de démocratie ».
La formule, lourde de sens, traduit une colère contenue, mais aussi une volonté d’ancrer la contestation dans le cadre institutionnel — loin des appels à l’insurrection.
Le ton d’un parti qui refuse la résignation
L’UDC appelle les Camerounais à “se dégager de l’emprise des acteurs de l’ombre qui détournent le choix souverain du peuple”. Ce message, adressé à la fois au gouvernement, aux partenaires internationaux et à la société civile, met en lumière une ambition : celle de replacer la question électorale au centre du débat national, au-delà des querelles partisanes.
À travers cette déclaration, Hermine Patricia Tomaino Ndam Njoya signe un texte à la fois politique et philosophique, où le diagnostic institutionnel se mêle à un plaidoyer pour la dignité nationale. « Parce qu’au bout du compte, ce sont les intérêts du peuple camerounais qui se retrouvent pris en otage par des calculs égoïstes et partisans », écrit-elle en conclusion.
Dans un Cameroun post-électoral secoué par les proclamations de victoires et les frustrations populaires, l’UDC rappelle que la légitimité démocratique ne peut naître d’un scrutin entaché d’irrégularités. Sa voix, ferme et résolue, se fait l’écho d’une exigence incontournable : réformer, restaurer, refonder.
Au-delà des calculs politiciens, c’est la confiance du peuple qui se joue, et l’UDC se pose en gardienne vigilante de cette souveraineté, déterminée à ne jamais laisser la démocratie se dissoudre dans l’opacité et la manipulation.
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