IMG 20250714 WA0006

Cameroun| Présidentielle 2025 : Paul Biya ne veut pas retourner à Mvomekaa.

L’histoire semblait écrire son dernier chapitre. Les rumeurs allaient bon train sur une possible sortie discrète, une retraite méritée, un départ sans fracas. Mais ce 13 juillet 2025, à 92 ans, Paul Biya a officiellement annoncé sa candidature à l’élection présidentielle du 12 octobre prochain, briguant ainsi un huitième mandat à la tête de l’État camerounais.

Plus qu’une décision politique, cette annonce marque la continuité d’un règne parmi les plus longs de l’histoire contemporaine, non seulement en Afrique, mais dans le monde.

De 1982 à 2025 : quatre décennies de pouvoir

Le 6 novembre 1982, Paul Biya est investi président de la République du Cameroun, succédant à Ahmadou Ahidjo. Il a alors 49 ans. En quarante-trois ans, le monde a changé plusieurs fois : la Guerre froide s’est achevée, l’Union européenne s’est élargie, l’Afrique a connu des transitions démocratiques et des crises profondes, le numérique a bouleversé les sociétés. Mais le Cameroun est resté, lui, sous la même direction.

Depuis cette date, le président Biya a été réélu à sept reprises : en 1984, 1988 (élections sans opposition), puis en 1992, 1997, 2004, 2011 et 2018, après l’instauration du multipartisme. Chaque scrutin s’est déroulé dans un cadre légal régulé par des réformes électorales successives, bien que régulièrement critiquées par l’opposition.

Le passage des années n’a pas entamé la présence du chef de l’État sur la scène nationale. Bien au contraire. En maintenant une visibilité institutionnelle forte et en s’appuyant sur un parti dominant – le RDPC –, Paul Biya a réussi à faire de sa longévité un élément central du paysage politique camerounais.

Une exception africaine ? Comparaisons historiques

Sur le continent africain, plusieurs dirigeants ont marqué leur époque par la durée de leur règne. Mais peu peuvent encore être comparés, aujourd’hui, à Paul Biya.

  • Félix Houphouët-Boigny, en Côte d’Ivoire, est resté au pouvoir de 1960 à 1993 (33 ans).
  • Omar Bongo Ondimba, au Gabon, a dirigé son pays de 1967 jusqu’à sa mort en 2009 (42 ans).
  • Robert Mugabe, au Zimbabwe, a gouverné de 1980 à 2017 (37 ans).
  • Yoweri Museveni, en Ouganda, dirige depuis 1986.

Avec 43 années au pouvoir, Paul Biya devient ainsi le doyen des chefs d’État africains en exercice, tant par l’âge que par la durée de ses mandats. Une longévité qui interroge autant qu’elle étonne, dans un monde politique globalement marqué par la rotation et l’alternance.

Le pouvoir comme institution

Avec le temps, le président Biya n’est plus seulement un acteur politique. Il est devenu une figure tutélaire, au point où sa personne semble indissociable du fonctionnement même de l’État. Cette identification du pouvoir à un individu est un phénomène observé dans plusieurs régimes où l’autorité présidentielle s’est installée durablement.

Certains y voient une forme de stabilité, d’autres un obstacle à l’émergence de nouvelles générations politiques. Mais tous s’accordent à reconnaître que Paul Biya incarne aujourd’hui bien plus qu’une simple fonction élective : il est une constante du système politique camerounais, une figure autour de laquelle s’est construite une partie de la mémoire institutionnelle du pays.

Les institutions elles-mêmes – gouvernement, Assemblée, partis alliés, corps administratifs – ont été façonnées dans l’ombre d’un exécutif fort et centralisé. Cette centralité du président Biya a contribué à structurer l’espace politique, mais aussi à retarder certaines dynamiques de transition interne, qu’elles soient générationnelles ou idéologiques.

Un départ reporté, encore une fois

L’expression “retourner au village” est souvent utilisée au Cameroun pour évoquer le retrait de la vie publique, la retraite, ou le repos du sage après un long service. Depuis quelques années, cette image est régulièrement évoquée lorsque le nom du président est prononcé, dans les conversations, sur les plateaux de télévision ou dans les tribunes citoyennes.

Mais en 2025, Paul Biya ne retournera donc pas au village. Du moins, pas tout de suite. Sa candidature prolonge une séquence historique inédite, dans laquelle l’histoire s’écrit avec la même plume depuis plus de quatre décennies. La présidentielle d’octobre prochain s’annonce comme un nouveau chapitre d’un livre déjà long.

Une page de plus dans une trajectoire politique rare, parfois controversée, mais toujours marquante. Paul Biya n’a pas quitté la scène. Et le Cameroun, une fois encore, s’apprête à voter dans un décor familier.

Afrik inform ☑️

× QR Code Afrik Inform

Rejoignez notre chaîne Telegram

Recevez toutes les dernières actualités et publications d’Afrik-Inform en temps réel.

📲 Suivre Afrik-Inform