Alors que le ministre délégué à la Justice, Jean De Dieu Momo, annonce avec assurance le rejet prochain de la candidature de Maurice Kamto à la présidentielle de 2025, plusieurs voix juridiques autorisées – dont celles du juriste Constant François Nepinbong et du politologue Moussa Njoya – viennent remettre les pendules du droit à l’heure. Analyse rigoureuse d’une manœuvre qui semble plus politique que juridique.
⚖️ Quand Momo juge… sans base légale
Dans une sortie médiatique bruyante, Jean De Dieu Momo reproche à Maurice Kamto deux fautes censées entacher son dossier :
1. Une légalisation jugée irrégulière de sa déclaration au commissariat.
2. Une présumée double appartenance entre le MRC et le Manidem.
À l’analyse des textes de loi, ces accusations apparaissent comme juridiquement infondées – voire fallacieuses.
📄 Acte 1 : La légalisation policière — légale, courante et conforme aux textes
Selon Momo, seuls les préfets, sous-préfets ou gouverneurs peuvent légaliser un acte de candidature. Cette affirmation est fausse, comme l’attestent juristes et praticiens du droit.
➡️ Le décret n°2001/041/PM du 19 février 2001 est formel : « Toute autorité administrative, judiciaire ou municipale » peut légaliser une signature. Il n’est écrit nulle part que la légalisation doit impérativement se faire chez un sous-préfet ou un gouverneur.
👉 Par conséquent, une légalisation effectuée dans un commissariat de police est parfaitement valable et conforme au droit camerounais, comme le confirment de nombreux juristes.
En outre, l’article 122 du Code électoral, relatif à la déclaration de candidature, ne précise aucune autorité exclusive compétente pour la légalisation. En l’absence d’une telle restriction, le principe de compétence partagée s’applique.
💬 Me Constant François Nepinbong rappelle : « Qui mieux que les services de police, qui délivrent les cartes nationales d’identité, pour authentifier une signature ? »
🧾 Acte 2 : Investiture par le Manidem = appartenance au Manidem ? Non.
Momo évoque l’article 3 de la loi n°90/056 du 19 décembre 1990, qui interdit la double appartenance partisane. Mais il confond volontairement investiture électorale et adhésion militante.
💬 Me Nepinbong tranche : « Être investi ne signifie pas être membre. C’est un soutien politique, pas une adhésion formelle ».
✔️ Tant que Maurice Kamto :
ne possède aucune carte de membre du Manidem,ne siège pas dans ses instances,
ne participe pas à ses décisions internes,
👉 il n’est pas juridiquement membre du Manidem. Son investiture reste un acte de coalition politique, et non une adhésion statutaire.
📌 Ce que dit réellement la loi
🔹 L’article 5, alinéa 2 du Code électoral précise qu’un acte notarié n’est exigé qu’en cas de changement de parti politique. Ce n’est pas le cas ici : Maurice Kamto demeure président du MRC.
🔹 Les articles 122 et suivants du Code électoral ne conditionnent pas l’investiture d’un candidat à son appartenance au parti qui l’investit. Cette exigence n’existe pas en droit camerounais.
🗣️ Moussa Njoya : « Pas besoin de démissionner de son parti pour être investi ailleurs »
🚨 Le politologue Moussa Njoya apporte une précision essentielle : « Sur le plan strictement légal et juridique, il n’est pas nécessaire pour le président d’un parti politique de démissionner de son parti pour être investi par un autre. De même, on n’a pas besoin d’être militant d’un parti pour être investi par celui-ci».
➡️ Ce qui est interdit, c’est d’être investi par plusieurs partis pour un même scrutin ou plusieurs scrutins tenus en parallèle.
➡️ Ce qui est exigé, c’est que l’organe investisseur en ait le pouvoir selon les statuts du parti concerné.
🔍 Les précédents camerounais : la pratique valide la jurisprudence
🗓️ En 1992, Fru Ndi est investi par le SDF, soutenu par l’UPC-Manidem et plusieurs partis sans y être affilié.
🗓️ En 2018, Cabral Libii est investi par UNIVERS sans y être militant, tout comme Akere Muna investi encore univers et soutenu par des plateformes politiques variées.
➡️ La coalition politique et les candidatures croisées sont autorisées par la loi tant qu’il n’y a pas de double appartenance formelle.
⚠️ Momo : une posture politique, pas juridique
La réalité juridique est claire : ELECAM est seule habilitée à juger la recevabilité des candidatures. En cas de contestation, le Conseil constitutionnel est l’instance compétente.
Aucun ministre, aussi tonitruant soit-il, n’a pouvoir de rejeter une candidature.
✅ Conclusion : Kamto, une candidature juridiquement inattaquable
✔️ Légalisation au commissariat : légale et conforme au décret en vigueur.
✔️ Investiture par un autre parti : permise, tant qu’il n’y a ni changement de parti, ni double investiture, ni adhésion statutaire.
✔️ Aucun article du Code électoral ou de la loi sur les partis politiques n’a été violé. Les tentatives de disqualification n’ont rien de juridique. Elles sont l’aveu d’un malaise : celui que suscite une réelle alternance politique en 2025.
🖋 Nakata Tomwooh – Pour Afrik-Inform
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