IMG 20250802 WA0085

Bénin | Patrice Talon, le président qui s’en va par la grande porte

Il a promis de ne pas s’éterniser. Il l’a tenu. Le 1er août 2025, Patrice Talon a présidé avec émotion les festivités marquant le 65e anniversaire de l’indépendance du Bénin. Une ultime cérémonie en tant que président de la République, avant de passer le flambeau en avril 2026. Ainsi s’achève une décennie de pouvoir sans forcing, et surtout, sans troisième mandat.

Dans une époque où les dirigeants africains semblent éprouver des difficultés à quitter le pouvoir, Patrice Talon prend le contre-pied. Le visage marqué mais le regard serein, il a salué la foule une dernière fois en tant que chef d’État lors de la fête nationale du Bénin. Dans un message sobre publié sur sa page Facebook, il a écrit « C’est rempli d’émotions que j’ai présidé les manifestations officielles », a-t-il écrit, tout en remerciant les forces de défense et de sécurité, les troupes ivoiriennes et l’ensemble des Béninois qui ont « sublimé les festivités ».

Du coton à la présidence

Avant la politique, Patrice Talon fut un homme d’affaires. Il a bâti sa fortune dans le coton et la logistique portuaire. L’ancien « roi du coton » a longtemps œuvré dans l’ombre, proche des cercles de pouvoir sans jamais y entrer franchement. C’est en 2016 qu’il renverse la table.

Le 6 avril 2016, il devient président de la République du Bénin, succédant à Boni Yayi dont il fut autrefois l’allié avant de devenir l’adversaire.Dès ses premiers mois au pouvoir, Talon adopte une gouvernance de rupture. Il promet une « thérapie de choc » pour redresser un pays miné par la corruption et le laxisme administratif. Les réformes s’enchaînent, parfois avec brutalité, souvent avec efficacité.

L’homme des réformes

Sous Talon, le Bénin change de visage. Il restructure l’administration publique, digitalise les services, modernise les infrastructures, et redonne une allure aux grandes villes du pays. Son mandat est marqué par un renforcement de la rigueur budgétaire, une diplomatie plus affirmée, et une relance du secteur touristique et patrimonial.

Le président ne ménage pas ses efforts, ni ceux de ses collaborateurs.Mais cette efficacité a aussi son revers. Le chef de l’État gouverne d’une main ferme, parfois trop. La réduction des libertés publiques, les lois sur le numérique et les rassemblements publics, les arrestations d’opposants et les procès expéditifs entachent son image.

Il est accusé de verrouiller le système politique. Ses détracteurs dénoncent un recul démocratique. Son second mandat, remporté en 2021 dans un climat tendu, est largement critiqué par la société civile et des observateurs internationaux.

L’héritage

Malgré les polémiques, Talon laisse un pays plus stable économiquement, plus moderne institutionnellement. Sa vision technocratique a assaini les finances publiques. Les résultats sont palpables : un taux de croissance en hausse, une amélioration de l’accès à l’électricité, une meilleure attractivité pour les investisseurs étrangers.

Dans son discours du 1er août, il confie : « Je suis allé jusqu’au bout de mes efforts, de mon imagination et de ma réflexion. J’ai travaillé avec bonne foi même si j’ai pu me tromper souvent. N’étant pas Dieu, je demande aux Béninois de me pardonner». Un aveu d’humilité rare, loin des postures triomphantes que l’on retrouve habituellement à la fin des mandats.

Une leçon d’élégance politique

À quelques mois des élections présidentielles prévues pour le 12 avril 2026, Patrice Talon réaffirme sa décision : il ne se représentera pas. Aucune manœuvre constitutionnelle, aucune volonté de s’accrocher. Cette posture, rare en Afrique de l’Ouest, force le respect.

Elle jette un éclairage sur une autre manière de faire de la politique : sobre, directe, sans fanfare inutile.« Nous avons déjà tout le potentiel en nous pour sortir du sous-développement si nous accédons à quelques sacrifices et efforts en commun », écrit-il dans un message empreint de foi en son peuple.

L’homme d’affaires devenu président s’efface avec la même discrétion qu’il avait utilisée pour s’imposer. Patrice Talon partira donc dans quelques mois. Il laisse derrière lui un pays transformé, un pouvoir sans successeur désigné, et une leçon politique : celle que l’on peut servir sans se servir, gouverner sans dominer, diriger sans s’éterniser.

Constantin GONNANG, Afrik inform ☑️

× QR Code Afrik Inform

Rejoignez notre chaîne Telegram

Recevez toutes les dernières actualités et publications d’Afrik-Inform en temps réel.

📲 Suivre Afrik-Inform
Social Media Auto Publish Powered By : XYZScripts.com
Trump et les présidents africainsStories
Verified by MonsterInsights