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Cameroun| Présidentielle 2025 : « Irrecevable », le retour du juge le plus redouté du Cameroun

Alors que le rideau est tombé sur la phase de dépôt des candidatures pour l’élection présidentielle du 12 octobre 2025, les projecteurs se tournent vers une institution stratégique mais souvent silencieuse : le Conseil électoral d’ELECAM, chargé d’examiner les 81 dossiers enregistrés.

Mais déjà, dans l’ombre de ce processus, une autre figure familière commence à attirer les regards : Clément Atangana, président du Conseil constitutionnel, dont les interventions, en cas de contestation, peuvent peser lourd dans l’équilibre démocratique du pays.

🔹 Le temps du tri : l’heure du Conseil électoral

C’est une scène que les Camerounais ont appris à guetter. Devant les caméras, une voix calme, posée, presque monocorde, qui égrène des formules au lexique lourdement juridique : « irrecevable », « absence de qualité », « rejeté pour défaut d’intérêt »… Derrière ces décisions, se dessine l’influence d’un homme au verbe laconique mais à l’autorité certaine.

C’est d’abord à ELECAM, via son Conseil électoral, que revient la lourde tâche de filtrer les candidatures. Chaque dossier est passé au crible : conformité aux critères légaux, pièces justificatives, parrainages, etc. Le verdict de recevabilité ou d’irrecevabilité sera ensuite notifié aux candidats.

C’est ce Conseil électoral qui établit la liste définitive des candidats, attendue au plus tard le 10 août 2025, et qui en informe officiellement le Conseil constitutionnel. Mais si un candidat estime sa disqualification injustifiée, c’est là que Clément Atangana entre en scène.

🔹 De juge à figure tutélaire du régime

Né le 20 septembre 1941 à Ngomedzap, dans le département du Nyong-et-So’o, région du Centre, Clément Atangana entame sa carrière judiciaire en décembre 1968, affecté comme juge suppléant à la Cour d’appel de Douala. Très vite, il prend le chemin d’un parcours exemplaire à travers les juridictions du pays : juge au Tribunal de première instance de Nkongsamba en 1969, président du Tribunal d’Eséka en 1971 , un poste qu’il ne gardera que trois mois avant de diriger le Tribunal de Bafia à partir du 14 août 1971.

De 1974 jusqu’à son départ à la retraite, il multiplie les responsabilités : juge à Douala, président du Tribunal de Mora, puis juge à Yaoundé, avant d’être nommé président des tribunaux de Sangmélima puis de Yaoundé. En 1981, il rejoint la chancellerie comme directeur adjoint des Affaires judiciaires et du Sceau.

Sa trajectoire prend un nouvel élan en 1988 avec sa nomination comme procureur général près la Cour d’appel de Garoua, puis président de la Cour d’appel de Yaoundé l’année suivante. Il devient également président de la Chambre d’appel de l’Ordre professionnel médico-sanitaire, toujours en 1989.

En 1991, Clément Atangana est nommé conseiller à la Cour suprême, une fonction qu’il occupera jusqu’à la fin de sa carrière. Membre titulaire du Conseil supérieur de la magistrature dès 1998, il étend son rayonnement à l’international en siégeant au Comité des droits économiques, sociaux et culturels de l’ONU entre 1999 et 2003.

Élevé au rang de magistrat hors hiérarchie 1er groupe depuis le 1er juillet 2000, il est chevalier puis officier de l’Ordre de L’UMS la Valeur. C’est en 2018 que son nom explose dans la sphère publique, lorsqu’il est nommé par décret présidentiel à la tête du tout nouveau Conseil constitutionnel, instance prévue par la Constitution de 1996 mais restée longtemps en veilleuse. Dès lors, il devient le visage de la régulation électorale suprême, chargé de dire le droit… et parfois d’en fixer les contours.

🔹 L’homme de l’« irrecevable »

Pour beaucoup, Clément Atangana reste associé au scrutin présidentiel de 2018 et à la crise post-électorale qui s’en est suivie. Devant une nation suspendue à ses lèvres, il avait prononcé la célèbre formule restée dans les mémoires : « Votre recours est déclaré irrecevable ». Une sentence adressée au professeur Maurice Kamto, alors chef de file du MRC, venu contester la réélection de Paul Biya.

Ce jour-là, les partisans de l’opposition crient à la partialité. Les défenseurs du régime louent la solidité institutionnelle. Clément Atangana, lui, ne dévie pas. Il campe sur la rigueur des textes et la lettre des procédures. Impassible, presque figé.

🔹 Un Conseil muet, mais jamais inactif

Depuis la fin de la tempête politique de 2018, le Conseil constitutionnel s’est muré dans une discrétion absolue. Peu de prises de parole, encore moins d’interventions médiatiques. Clément Atangana, fidèle à sa posture de magistrat, refuse les projecteurs. Mais en coulisse, il continue d’incarner la digue légale du régime. Silencieux, mais stratégique.

Cette année, 81 candidatures sont à examiner, dont celles de Paul Biya, Maurice Kamto, Akere Muna , Cabral Libi’i….ou encore de plusieurs indépendants. Dans cette marée de prétendants, le Conseil devra distinguer le sérieux de l’illusoire, le conforme du fantaisiste. Et dans cette sélection, c’est encore Clément Atangana qui tranchera. Lui dont les décisions sont sans appel.

🔹 Un cacique au service du système

« Je suis un serviteur de l’État, pas un acteur politique », avait-il déclaré dans une rare confidence en marge d’une audience. Mais ses détracteurs lui reprochent une proximité supposée avec le pouvoir en place. Nommé par décret présidentiel, élevé au sommet de la magistrature par le même système qu’il est censé surveiller, Clément Atangana incarne une figure typique du régime : loyal, discret, et indéboulonnable.

À l’aube de ses 84 ans, il semble pourtant toujours aussi vigilant. Dans les allées feutrées du Conseil constitutionnel, le temps est venu de ressortir les codes, les jurisprudences, les articles, et d’ordonner les noms. Ceux qui passeront. Et surtout, ceux qui ne passeront pas.

🔹 Jusqu’au 10 août, ELECAM filtre, Atangana veille

La loi électorale accorde jusqu’au 10 août au Conseil électoral pour publier la liste définitive des candidats. Mais déjà, dans les états-majors politiques, on redoute les rejets, les contestations, les recours.

Et c’est là, en arbitre ultime, que l’homme D’Ekoumeyek ipourrait revenir sur scène. Discret, méthodique, mais redouté, il reste celui dont un mot peut changer le cours d’un destin politique.

Dans ce ballet politique bien huilé, Clément Atangana avance à pas mesurés. Mais à chaque mouvement, c’est tout l’échiquier démocratique qui s’ajuste.

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