Le Gabon vit actuellement un scandale de proportions inédites, secouant le secteur agroalimentaire et plongeant l’empire industriel du Camerounais Bernard Fokou dans une tourmente sans précédent. Le groupe Foberd Gabon, fleuron de l’industrie agroalimentaire et l’un des plus grands employeurs du pays, est au centre d’une affaire qui soulève des interrogations profondes sur les pratiques de contrôle dans le pays.
Mais derrière les accusations de fraude alimentaire et de produits avariés se cache une histoire de traitement brutal, de détentions arbitraires et, selon certains observateurs, une véritable chasse aux sorcières orchestrée contre l’entreprise.
L’irréparable escarmouche des autorités gabonaises
Tout a commencé par une descente inopinée des autorités sanitaires gabonaises. L’Agence Gabonaise de Sécurité Alimentaire (AGASA), après une série d’inspections dans les entrepôts du groupe Fokou, a mis au jour des pratiques jugées inacceptables : produits périmés, reconditionnement de denrées avariées et falsification de dates de péremption.
En un clin d’œil, la réputation de Foberd, autrefois exemplaire, est réduite en cendres. Quinze hauts responsables de l’entreprise ont été interpellés, dont plusieurs membres de la famille Fokou, y compris le fils du fondateur, Fongang Loïck, ainsi que des cadres dirigeants. Tous ont été accusés de “mise en danger de la vie d’autrui” et de “falsification de produits alimentaires”, des accusations lourdes qui font l’effet d’un coup de tonnerre dans le ciel clair de l’industrie gabonaise.
Les autorités gabonaises, ne s’arrêtant pas là, ont fermé toutes les structures du groupe : magasins, entrepôts, bureaux. Ce coup de filet a choqué l’opinion publique et jeté une ombre sur les pratiques de contrôle dans le pays, avec des interrogations sur la proportionnalité des mesures prises. L’affaire ne tarde pas à prendre une tournure encore plus sombre avec des accusations de torture. Des responsables, tant camerounais que gabonais, auraient été maltraités, battus, et, selon des témoins, l’un des cadres aurait même subi une fracture après une détention musclée.
Une attaque ciblée ?
Pour certains observateurs, l’affaire ne se résume pas à une simple question de fraude alimentaire. Des voix s’élèvent pour dénoncer ce qu’ils appellent une « cabale » visant à fragiliser l’empire Fokou. Aristide Bounah, chef d’entreprise et observateur attentif de la scène économique, a qualifié la situation d‘« attaque ciblée contre les entreprises étrangères au Gabon».
Selon lui, la gestion des produits périmés dans les entrepôts est une pratique courante dans les grandes entreprises, même dans les pays occidentaux. Les produits périmés ne sont pas systématiquement détruits, mais parfois conservés pour des raisons comptables ou logistiques, et ne sont pas nécessairement destinés à être mis en rayon. Aristide Bounah s’interroge donc sur la proportionnalité de la réaction des autorités gabonaises, notamment l’utilisation de mesures extrêmes comme la torture et la fermeture d’entreprises.
La thèse d’une attaque ciblée semble se confirmer lorsque l’on considère la position du groupe Fokou dans l’économie gabonaise. En effet, avec plus de 1700 employés, dont une grande majorité de nationaux gabonais, le groupe est l’un des plus grands employeurs du pays, juste derrière l’État et Olam, géant international.
Pour certains, l’affaire pourrait s’apparenter à un règlement de comptes, voire à un acte de xénophobie. D’autant que les entreprises Fokou emploient une part significative de Camerounais, dont plusieurs ont été arrêtés et maltraités, parfois devant leurs collègues, exacerbant ainsi les tensions entre les communautés.
La diplomatie Camerounaise a son rôle à jouer
Face à cette crise, la diplomatie camerounaise est interpellée. Plusieurs voix, dont celle de Shanda Tomne, réclament une prise de position rapide du gouvernement camerounais pour protéger ses ressortissants et clarifier la situation. Une communication urgente serait, selon lui, essentielle pour éviter de nouveaux dérapages et pour rassurer les entreprises camerounaises présentes au Gabon.
L’ambassade du Cameroun à Libreville est appelée à intervenir pour s’assurer que les droits de ses citoyens, en particulier ceux du groupe Fokou, soient respectés et que des sanctions injustifiées ne frappent pas les entreprises camerounaises.L’incident suscite également une réflexion sur les relations économiques entre les deux pays voisins.
Le Gabon, longtemps considéré comme un terreau propice aux investissements étrangers, pourrait bien voir sa réputation ternie par cet épisode. Bernard Fokou, victime d’une attaque contre son groupe, pourrait-il en sortir indemne ? Les entreprises étrangères au Gabon, en particulier celles venant du Cameroun, risquent de se poser des questions sur la sécurité juridique de leurs investissements à l’avenir.
L’affaire Fokou, un révélateur de tensions latentes
Le scandale Foberd Gabon dépasse le simple cadre d’un contrôle de conformité alimentaire. En réalité, il met en lumière des tensions sous-jacentes qui existent entre les entreprises étrangères, particulièrement camerounaises, et le pouvoir local. Ce qui semblait être un problème de gestion de produits périmés pourrait bien n’être qu’un prétexte pour frapper une entreprise jugée trop puissante et trop influente.
Dans ce contexte, la bataille pour défendre l’honneur du groupe Fokou est loin d’être terminée, et le rôle de la diplomatie camerounaise sera crucial pour éviter que cette crise ne se transforme en un affrontement ouvert entre les deux nations. L’affaire continue de secouer le Gabon, et de nombreuses questions demeurent.
La vérité éclatera-t-elle un jour sur cette histoire qui semble avoir été montée en épingle ? Seul l’avenir pourra le dire. Mais une chose est certaine : l’empire Fokou n’a pas dit son dernier mot.
La rédaction d’ Afrik Inform ☑️