Par Jean Armel Bissi, enseignant de philosophie. Diplômé des Écoles Normales du Cameroun.
Depuis deux jours déjà, nous avons dans les galeries de nos téléphones portables un homme dont l’appétit sexuel est titanesque. Sa jolie épouse et ses six enfants n’ont pas pu éteindre le feu qui brûle en lui. Il a déshabille des centaines de femmes, les a connues et toutes se plaisaient à son jeu.
Les informations en cours depuis Malabo, la capitale de la Guinée Équatoriale, font état de plus de 400 vidéos aux contenus obscènes. Des images dans lesquelles un seul individu étrille l’intimité sexuelle de plusieurs dames dont la plupart seraient mariées. Au bureau, dans les toilettes, sur la plage, sur une rue en plein milieu de la nuit, Balthazar montre que le sexe est sa passion.
Il se le procure sans choisir les lieux et les personnes. C’est son plaisir qui compte. Malheureusement, au moment où ces images inondent la toile, les interprétations qu’en font beaucoup d’internautes souffrent de beaucoup de déconvenues. On attribue à Balthazar d’être dans des sectes pernicieuses. C’est depuis ces milieux qu’on le contraindrait à soulever chaque jupe qui passe devant lui.
Il y a aussi des gens qui pensent que cet acteur rare est plutôt quelqu’un qui se livre à des rituels mystiques dont le but est de capter des énergies féminines en vue des responsabilités plus élevées dans l’administration publique de son pays. Il nous est arrivé aussi de voir des gens dire que Balthazar est riche et comble les femmes de plusieurs largesses financières contre des services sexuels. Ils ne sont pas moins nombreux ceux qui en font un fou, un pervers, un psychopathe bref une personne aux mœurs légères.
Avec Sigmund Freud, essayons de mieux comprendre Balthasar. Freud a voulu comprendre l’univers psychique des êtres humains. Il est arrivé à postuler la notion d’inconscient comme la sphère des pulsions, des émotions, des désirs et passions qui contrarient à la fois la conscience humaine et les valeurs que la société des Hommes préconise.
Pendant que Freud nomme dans sa deuxième topique les valeurs sociales que protège la société : le surmoi, il désigne la conscience comme le moi puis fait nommer l’inconscient en terme de ça. Les observations de Freud font état de ce que notre univers psychique est en grande partie dominé par le ça : nos pulsions, nos désirs et nos fantasmes. Ils viennent à tout moment frapper à la porte du moi qui est notre conscience.
Pour leur résister, le moi ou la conscience doit avoir eu de très bonnes assises dans le surmoi qui est le socle des valeurs que protège toute société. La bataille de notre univers psychique qui définit par ailleurs le type d’Hommes que nous sommes oppose le ça ( le règne de nos pulsions) et le surmoi ( les valeurs sociales). Cette bataille dure toute la vie et définit nos choix : notre moi ou notre conscience.
Malheureusement, le moi n’est toujours pas le plus fort. Freud dans Introduction à la psychanalyse affirmera à cet effet : ” Le moi n’est toujours pas maître dans sa propre maison “. Ainsi, la hantise du sexe n’est pas à comprendre comme un fait mystique, une pratique de sorcellerie ou encore une manifestation d’un esprit diabolique. C’est une simple pulsion qui est devenue incontrôlable. Elle s’est déjà imposée au moi ou à la conscience.
Elle veut par ailleurs déjà aussi s’imposer à la société. C’est pour cela que celui en qui se meut cette pulsion deviendra d’une immoralité rare. Il ne respecte pas les femmes des autres. Il en fait ses proies. Il n’a plus le sens de la parenté. Même ses cousines et tantes sont pour lui des objets de plaisirs. Il trouve satisfaction en chevauchant toutes les femmes qui passent devant lui.
Cela peut parfois s’étendre jusqu’à ses propres filles lorsque l’âme est déjà ruinée par cette pulsion. Alors, la hantise sexuelle n’est pas le fait de la sorcellerie. Ce n’est pas une affaire de sectes. C’est un problème psychologique. Ceux qui en sont victimes ont besoin d’accompagnement. Ils ne sont ni des héros ni des démons mais de simples malades qui ont besoin d’accompagnement. Bien-sur, les hypothèses de Freud ne vont guère prospérer devant les intuitions de Edmund Husserl qui affirme dans Méditations cartésiennes : ” Toute conscience est conscience de quelque chose”. Autrement dit, les pulsions ne sont des excuses à rien. Chacun sait ce qu’il fait.
On ne peut attribuer à autre chose ou à autrui des gestes relevant de la liberté de choix de chacun. Pareillement, Jean Paul Sartre se montre opposé à tout inconscient et n’admet pas la notion de pulsions. Dans L’existentialisme est un humanisme, il affirme : ” Chaque personne doit être responsable des actes qu’elle pose”. L’ inconscient pour Sartre est tout simplement une incarnation de la mauvaise foi. Alors, tant pour Husserl que pour Sartre, la notion d’inconscient ne justifie rien et ne protège de rien.
Chacun est libre devant ses choix et doit les assumer. Cette perspective nous aide donc à clore notre propos. Celui qui est sous le coup de la hantise sexuelle doit répondre de ses actes. Celui (ou celle) aussi qui se fait l’accompagnateur(trice) d’un pervers doit assumer ses choix. On ne peut ni se priver de les critiquer ni les exonérer de la vigueur des lois en la matière.
Propos recueillis par Constantin GONNANG pour Afrik Inform ☑️ .