En 2025, le continent africain reste lâun des endroits les plus dangereux pour les journalistes, notamment dans les zones de conflit. Le rapport annuel de Reporters Sans Frontières (RSF) souligne que les journalistes africains subissent des pressions extrêmes, oscillant entre attaques physiques, menaces de mort et censures.
Des régions comme la République Démocratique du Congo (RDC), le Sahel, ou encore le Tchad sont en première ligne de cette violence envers les médias, avec des conséquences dramatiques pour la liberté de la presse.
Des zones de guerre transformées en zones de silence
Les conflits armés en Afrique sont une menace croissante pour les journalistes. En République Démocratique du Congo, particulièrement dans le Nord-Kivu, la situation est de plus en plus désastreuse pour la presse. Le rapport de RSF révèle que « le Nord-Kivu demeure lâune des régions les plus périlleuses pour les journalistes, avec au moins deux journalistes tués depuis septembre 2024».
Ce type de violence nâest pas isolé et se produit souvent dans des régions où les groupes armés contrôlent la majorité des territoires et où les autorités locales nâont ni les ressources ni la volonté de protéger les journalistes. Cette situation génère une ambiance de terreur où lâinformation devient un luxe presque inaccessible.
Les journalistes travaillant dans ces régions de guerre font face à des attaques directes mais aussi à des menaces de plus en plus sophistiquées. RSF dénonce que ces zones de conflit se transforment lentement en âdéserts informationnelsâ, où lâaccès à une presse libre et indépendante devient pratiquement impossible.
Enlèvements et menaces : un quotidien dangereux
Les enlèvements de journalistes sont devenus une méthode fréquente pour limiter la liberté dâexpression dans les zones de guerre. En 2024, quatre journalistes ont été enlevés au Burkina Faso, un pays gravement touché par lâinsurrection jihadiste. RSF explique que ces enlèvements âont pour but de museler la presseâ, précisant quâau-delà des risques physiques, les journalistes se retrouvent pris dans un piège de silence imposé par des groupes armés.
Les autorités de certains pays, comme le Mali et le Niger, sont souvent incapables dâagir rapidement pour libérer ces journalistes, exacerbant ainsi la vulnérabilité du métier de journaliste dans ces pays. Derrière ces disparitions, se cache également la réalité des pressions politiques, avec des gouvernements parfois répressifs qui choisissent de ne pas intervenir pour éviter dâattirer lâattention internationale sur leurs échecs à maintenir lâordre public.
Cette passivité renforce lâimpunité et encourage une culture de la violence à lâencontre des journalistes.
Lâinstabilité qui nourrit la censure
Au-delà des violences physiques, la censure reste une arme puissante dans la répression des journalistes. Dans des pays comme le Tchad, le Mali ou encore le Soudan, les journalistes se retrouvent face à un dilemme : rendre compte des événements en toute indépendance ou se soumettre à la censure imposée par les autorités locales et les acteurs militaires.
Le rapport de RSF précise que dans ces pays, « les journalistes sont souvent confrontés à des choix difficiles entre leur engagement à informer et leur survie personnelle» .Face à cette situation, lâautocensure devient une réponse pragmatique pour de nombreux journalistes.
Ces derniers, conscients des risques encourus, choisissent parfois de modifier leurs reportages ou de les abandonner pour éviter des représailles. Cela engendre un silence médiatique qui prive les populations de lâinformation nécessaire à une véritable prise de décision démocratique.
La réponse des organisations internationales
Le rapport de RSF souligne également lâinefficacité de la communauté internationale à protéger les journalistes dans ces zones de guerre. Les pressions exercées sur les gouvernements locaux pour quâils respectent les droits des journalistes sont trop souvent insuffisantes ou mal orientées.
La guerre contre lâimpunité reste une bataille complexe dans des contextes aussi instables, où lâappareil judiciaire est souvent corrompu ou trop fragile pour agir efficacement. Pourtant, lâimpunité qui protège les auteurs de violences contre les journalistes est une des causes principales de lâescalade de ces attaques.
RSF appelle les organisations internationales à intensifier leur soutien, en fournissant une protection concrète et en exerçant des pressions diplomatiques sur les gouvernements pour quâils respectent leurs engagements envers les droits humains et la liberté de la presse.
Pressions économiques et impact sur la liberté dâexpression
En plus des violences physiques, les journalistes africains subissent également des pressions économiques considérables. Le modèle économique des médias locaux, déjà fragile avant les conflits, est aujourdâhui gravement affecté par lâinstabilité.
Les médias locaux sont de plus en plus dépendants des financements étrangers ou dâorganisations internationales, mais ceux-ci se font rares, particulièrement dans les régions en guerre.RSF fait état de la situation précaire de certains journaux et chaînes de télévision qui, faute de ressources suffisantes, ferment leurs portes ou limitent leur couverture.
Dans des pays comme la RDC, le Mali ou encore le Burkina Faso, les journalistes sont contraints à chercher des financements privés, souvent en échange de compromis éditoriaux qui réduisent encore la diversité de lâinformation disponible.
La nécessité de protéger les journalistes africains
Le rapport de RSF 2025 ne fait que renforcer lâappel urgent à une protection accrue des journalistes en Afrique. Dans un contexte où les journalistes sont attaqués sur tous les fronts â quâil sâagisse de violence physique, de pressions politiques ou économiques â il est impératif que des mesures efficaces soient prises pour garantir leur sécurité et leur liberté dâexpression.
Cela passe par un soutien politique clair de la part des gouvernements africains, un renforcement des structures judiciaires pour lutter contre lâimpunité et un investissement dans la formation et la protection des journalistes.
Constantin GONNANG, Afrik inform âï¸
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