Le Gabon continue de tracer les contours de son avenir politique. Dans la nuit du 20 au 21 janvier 2025, le Parlement de transition a adopté un nouveau code électoral, une étape cruciale vers le retour à un régime civil promis par le général Brice Oligui Nguema, chef de la junte militaire au pouvoir depuis le renversement de la dynastie Bongo en août 2023.
Un code électoral taillé sur mesure
Après dix jours d’examen minutieux, les 168 députés et sénateurs réunis en session extraordinaire ont approuvé ce texte de 383 articles, rédigé sous l’égide d’une commission désignée en décembre 2024 par le président de la transition.
Parmi les nouveautés marquantes, le texte permet désormais aux Gabonais de l’étranger d’être représentés par deux députés et autorise les binationaux à se porter candidats à toutes les élections, excepté la présidentielle, sans renoncer à leur autre nationalité.
Le changement le plus controversé réside dans l’ouverture des candidatures aux magistrats et militaires, sous réserve qu’ils se mettent en disponibilité avant le scrutin. Une disposition qui, selon certains opposants, pourrait permettre au général Oligui de prolonger son règne en dépit des engagements pris auprès de la communauté internationale.
L’écho des ambitions présidentielles
Ce nouveau code met fin à des mois de spéculations sur la possibilité pour Brice Oligui Nguema de se présenter à la présidentielle prévue dans sept mois. Alors que des foules se pressent dans les rues pour lui demander de briguer la magistrature suprême, ses intentions ne sont plus un mystère.
Depuis sa tournée républicaine de juillet 2024, au cours de laquelle il affirmait qu’« en sept ans, on fera plus », le général laisse entrevoir ses velléités présidentielles.Le chemin a été pavé dès novembre 2024 avec l’approbation par référendum d’une nouvelle Constitution instaurant une limitation des mandats à deux de sept ans chacun. L’article 42 stipule que « nul ne peut exercer plus de deux mandats successifs, quelles que soient les éventuelles révisions de la Constitution ».
Opposition vent debout
Face à ces manœuvres, l’opposition monte au créneau. Des figures telles qu’Alain-Claude Bilie-By-Nze, Pierre-Claver Maganga Moussavou ou encore Albert Ondo Ossa dénoncent une tentative de confisquer le pouvoir.
Lors d’une conférence de presse tenue le 8 janvier 2025, ils ont appelé les militaires à respecter la Charte sur la démocratie de l’Union africaine, qui interdit aux autorités issues de coups d’État de participer aux élections censées restaurer l’ordre démocratique.
Mais pour contourner cet écueil, le Gabon, suspendu des instances panafricaines depuis 2023, mise sur une brèche légale : les candidats militaires ou magistrats devront officiellement se retirer de leurs fonctions avant de se présenter.
«Organiser des élections parfaites »
Malgré les critiques, le président de l’Assemblée nationale de transition, Jean-François Ndongou, salue une « avancée significative ». Selon lui, ce code vise à « renforcer durablement la transparence, l’équité et la crédibilité des processus électoraux et référendaires ». L’objectif ultime, martèle-t-il, est de parvenir à des élections « parfaites, incontestables, libres, transparentes et démocratiques ».
Un pari risqué pour Oligui
Dans un contexte économique morose, marqué par une baisse des recettes pétrolières et une relation tendue avec les bailleurs de fonds internationaux, le général Oligui devra convaincre au-delà des cercles militaires.
Alors que des milliers de Gabonais battent le pavé pour le soutenir, d’autres attendent des actes concrets.La cinquième République, promise comme un antidote aux pratiques du passé, ne prendra véritablement forme qu’après la présidentielle de 2025.
En attendant, le Gabon demeure suspendu entre espoir et appréhension, tandis que l’avenir politique du général Oligui se dessine sur un fil de rasoir.
Par Constantin GONNANG, Afrik Inform ☑️