Le jugement de l’un des dossiers les plus symboliques de la Chambre des comptes du Cameroun attendra encore. Initialement attendu ce mercredi, le verdict concernant la gestion controversée d’un marché de 278 millions FCFA dans le cadre de la lutte contre le Covid-19 a été renvoyé au 30 avril 2025.
Réunie à Yaoundé dans une audience discrète, la juridiction a justifié ce report par la nécessité de « peaufiner le verdict », selon un magistrat proche du dossier. Une prudence interprétée en coulisses comme la volonté d’éviter tout faux pas dans une affaire très médiatisée, en pleine tempête sur la gestion des fonds de riposte sanitaire.
Une audience express et sans public
Mercredi matin, c’est dans une salle d’audience quasi vide que le juge Théodore Mbenoun a pris la parole pendant moins de cinq minutes pour annoncer le renvoi du délibéré.
Quatre hauts cadres du ministère de la Santé sont poursuivis pour des irrégularités commises dans le cadre d’un marché public attribué en 2020, en pleine crise sanitaire. Il s’agit de : Élysée Amour II Eyenga Ndjomo, conseiller technique ;Ousmane Diaby, chef de division ; Rémy Bekolo Edou, comptable ; Abiba Ntue Ngapout, payeur.
Le contrat portait sur la construction d’un centre d’isolement à l’hôpital de Ngaoundéré. L’un des principaux reproches concerne un « paiement anticipé » effectué avant l’achèvement des travaux, en violation flagrante des règles de passation des marchés publics. Au total, cinq manquements ont été relevés dans l’exécution de ce marché.
Sanctions requises : lourdes peines administratives
Le 27 mars dernier, lors des réquisitions, l’avocat général Félix Owona Etoundi a plaidé pour des peines exemplaires. Il a requis « 2 millions de FCFA d’amende par accusé, une interdiction de cinq ans d’exercer des fonctions financières publiques, et une déchéance de leur statut de fonctionnaire pour dix ans ».
Créée à la faveur de la réforme de 2018, la Chambre des comptes remplace l’ancien Conseil de discipline budgétaire et financière. Elle a uniquement compétence en matière administrative, ce qui signifie qu’elle ne peut prononcer de sanctions pénales, mais se limite à juger les fautes de gestion.
Une affaire emblématique dans un climat de défiance
Ce dossier est considéré comme un test majeur pour l’efficacité de la Chambre des comptes, alors que la population réclame toujours des explications sur l’usage des ressources mobilisées contre la pandémie.
Et si les débats portent ici sur 278 millions de FCFA, un autre scandale, beaucoup plus vaste, continue de hanter les institutions camerounaises : un présumé détournement de 180 milliards de FCFA, toujours en cours d’instruction devant d’autres instances.
Ce climat de suspicion persistante accentue la pression sur la justice administrative, dont l’impartialité et la rigueur sont scrutées à la loupe.
J.S pour Afrik inform ☑️